De l’iconographie du bienheureux pape Urbain V
Conférence donnée par Jean-Paul Mazot
le 28 septembre 2022 à Apt
et le 16 mai 2023 à Mende
De l'conographie du bienheureux pape Urbain V : Télécharger le PDF
Ce sujet passionnant a été abordé maintes fois. Marius Balmelle, un érudit mendois qui fut président de la Société des lettres, sciences et arts de la Lozère au milieu du XXe siècle a donné dans le Bulletin de cette association savante, en 1964, un article fouillé Iconographie du Pape Urbain V qui, à mes yeux, ne présente qu'une seule lacune, la faiblesse de l'illustration. Isabelle Darnas, conservateur du Patrimoine pour la Lozère, a, elle aussi contribué à cette étude, notamment en collaborant, en 2010, à la brochure Urbain V, grand homme et figure de sainteté éditée par la DRAC à l'occasion de la remise d'un tableau dont nous reparlerons.
Bien entendu, je n’ai pas ignoré l’exposition crée en 1981 pour le 1er Festival de Mende et du Gévaudan par Anne Trémolet de Villers, Le bienheureux pape Urbain V bienfaiteur du Gévaudan, présentée de nos jours au château de Grizac.
Tout cela pour vous dire que le chemin a déjà été bien déblayé et que les travaux d'hier ont grandement facilité ma tâche. À cela, il convient d'ajouter les contributions du recteur de Notre-Dame des Doms, à Avignon, le chanoine Daniel Brehier, sans compter la collaboration de plusieurs membres de l’association des ʺAmis du bienheureux pape Urbain V ʺ, je ne citerai que M. Renaud de Laubespin, Mme et M. de Cumond et notre présidente Claire de Gatellier.
Enfin, les précisions apportées en dernière minute par Jean-Marc Chevalier, président de la Société des lettres, sciences et arts de la Lozère.
Entreprenons donc notre quête en suivant le périple de Guillaume de Grimoard : depuis sa naissance au château de Grizac, en passant par Bédouès, le prieuré Saint-Sauveur de Chirac où il endossa la coule bénédictine, par Mende, ville épiscopale, le monastère Saint-Victor de Marseille lieu d'épanouissement de sa vie monastique, enfin Avignon où il exerça la fonction de guide suprême de l'Église catholique romaine.
Une sorte de chemin ponctué çà et là de représentations iconographiques ainsi que d'autres témoignages puisque installé sur le trône de saint Pierre il captera tous les feux des projecteurs non seulement en Gévaudan, dans le royaume de France, le Comté Venaissin, mais également en Italie, ainsi que dans différents pays d'Europe.
Première étape, à Bédouès, à l'église paroissiale dédiée à saint Saturnin. Guillaume de Grimoard y aurait été baptisé vers 1309-1310 : au centre du tympan de l'arc triomphal, deux anges couronnant de lauriers un large médaillon occupé par les armoiries du pape Urbain V. À l'intérieur de l'édifice religieux, un vitrail avec ses armes.
À proximité à vol d'oiseau, la collégiale, construite en 1363, pour abriter le tombeau des parents d'Urbain V, Guillaume et Amphélise de Montferrand. Au fronton du porche, peintes au-dessus du linteau de la porte d'entrée de l'église, les armoiries du Saint-Père, surmontées de la tiare et des clefs de saint Pierre et une inscription, B. Urbain V priez P. N. et surtout une statue polychrome d'Urbain V.
À proximité de Bédouès, le village de Cocurès. Un vitrail de la petite église nous interpelle : situé dans le chœur de l’église paroissiale il est d’une belle originalité puisqu’il représente le pape saint Urbain. Or, nous savons que le seul Urbain canonisé fut Urbain Ier, monté sur le trône de saint Pierre au IIIe siècle, mort martyrisé ; à moins de considérer que les paroissiens de Cocurès, confondant vitesse et précipitation, aient souhaité mettre à l’honneur un enfant du pays, il est difficile de voir dans ce vitrail une quelconque représentation du pape Urbain V.
Déplaçons-nous maintenant de quelques dizaines de kilomètres pour nous rendre au prieuré Saint-Sauveur de Chirac, actuelle église Saint-Nicolas, au Monastier. Un magnifique vitrail rappelle que cet édifice aurait été consacré par le pape Urbain II (Eudes de Châtillon), le 24 août 1092, en route vers Clermont pour prêcher la Première croisade et que Guillaume de Grimoard, futur Urbain V, y prit la robe de bure bénédictine vers 1330.
D'autres églises de Lozère, bénéficiaires des largesses du saint-Père gévaudanais, lui ont consacré un vitrail : celles de Bédouès, de Saint-Martin à Florac, de Notre-Dame à Quézac (en 2 parties tiare + crosse) et d'ailleurs, comme à Saint-Germain de Calberte.
▪ Statue en bronze de Dumont à Mende
Au mois de septembre 1841, Théophile Roussel part pour Rome et y restera jusqu’au début de l’année 1842, profitant de ce séjour pour continuer son travail sur Guillaume de Grimoard.
Ses premiers travaux à vocation historique, Recherches sur la vie et le pontificat d’Urbain V, seront couronnés par l’Académie des inscriptions et belles-lettres : il obtient une médaille d’or. L’ouvrage ne sera jamais publié, mais le manuscrit existe bel et bien. De nombreuses pages ont été publiées dans le Bulletin de la Société d'Agriculture de la Lozère lorsque Théophile Roussel en fut son président de 1854 à 1858.
Prolongeons la parenthèse sur Théophile Roussel : son action se situe dans un courant créé, au XIXe siècle, par des hommes soucieux de mettre en valeur des personnages, des événements, et même des monuments, afin de les inscrire dans un grand roman national : d’où Jeanne d’Arc, du Guesclin, et bien sûr Notre-Dame de Paris immortalisée par Victor Hugo. Voilà trois exemples frappants.
C’est dans ce contexte culturel que le docteur Roussel souhaite voir la place située devant la cathédrale de Mende, la Place Notre-Dame, prendre le nom d’Urbain V et qu’une statue du pape gévaudanais y soit érigée. On est en 1856. Il obtiendra satisfaction le…… 28 juin 1874
Une anecdote : le 15 avril 1867, le pape Pie IX reçoit en audience, au Vatican, le jeune Charles de Ligonnès, âgé de 22 ans, accompagné de sa sœur aînée Hélène. Le pape s’enquiert de la statue d’Urbain V que l’on envisage d’ériger à Mende.
Théophile Roussel, après la béatification de Guillaume de Grimoard en 1870, s’associe à la création d’une association chargée de récolter les fonds nécessaires à la réalisation de « l’œuvre sainte », qui était précisément d’élever sur la place de la cathédrale, la majestueuse statue du pape Urbain V.
Elle fut inaugurée le 28 juin 1874 par Mgr Saivet qui rappela ce que la chrétienté toute entière et l’église de Mende devaient à l’enfant de Grizac.
- Sculpteur : Auguste Dumont (1801-1884) Prix de Rome 1823, membre de l’Institut
Ses œuvres principales : Le Génie de la Liberté (République) en 1835 ; Napoléon Ier sur la colonne de la Place Vendôme (1863)
- Fondeur : Thébaut comme la statue de Du Guesclin à Châteauneuf-de-Randon
- La statue fut déplacée en 2002, ce qui donna précisément naissance à une violente polémique
▪ Tableau de la cathédrale de Mende
Cette œuvre peinte sur bois par un artiste inconnu représente le bienheureux Urbain V. Offert en 2008 à l’État par Mgr Jacolin, évêque de Mende, ce rare primitif italien de la première moitié du XVe siècle était placé, depuis 2009, à l’intérieur de la cathédrale de Mende, dans l’absidiole sud, dédiée à saint Privat, patron du diocèse de Mende. Ce tableau, classé MH, montre le pape Urbain V présentant aux chrétiens de Rome, les chefs de saint Pierre et saint Paul, les deux piliers de l’Église.
Acquis naguère, au XIXe siècle, par Mgr Barbier de Montault pour le compte de Mgr Saivet, le panneau est inscrit aux titres des MH en 1970 puis classé par arrêté du 2 mai 2005.
Comme le précisait Mgr Jacolin, évêque de Mende, dans son homélie prononcée le samedi 3 octobre 2009, lors de la commémoration du 700e anniversaire de la naissance de Guillaume de Grimoard, évoquant ce tableau : « Ainsi, sont réunis en un même lieu ces quatre saints, à l’importance certes bien inégale dans l’Histoire de l’Église, mais qui sont tous les quatre de vrais ˝pasteurs selon le cœur de Dieu˝ »
Effectivement, de retour à Rome en 1367, Urbain V avait entrepris de restaurer plusieurs monuments majeurs. Dans la basilique Saint-Jean de Latran il trouve les chefs de saint Pierre et de saint Paul.
Le tableau se trouvait, hier encore bien en vue, près de l'abside, dans la chapelle sud de la cathédrale de Mende, dite de saint Privat ; la clef de voûte de la chapelle représente Urbain V coiffé de la tiare et le vitrail saint Privat au côté de sainte Énimie.
Depuis la donne a changé. Certains affirment que ce primitif italien, intégré dans le trésor de la cathédrale, s’en trouve gratifié ; d’autres au contraire, déplorent que ce chef d’œuvre pictural soit en retrait du regard des fidèles.
Tableau du musée du Gévaudan
Une huile sur toile, anonyme, représentant Urbain V est exposée au Musée du Gévaudan. Il s’agit d’une œuvre, naguère revendiquée par la Société d’agriculture parmi les 23 tableaux des évêques de Mende, passés lors de la séparation de l’Eglise et de l’État, dans le giron de l’État.
Et non de celui indiqué dans le catalogue analytique et critique des tableaux et objets d'art du musée de Mende dressé par Émile Remy, en 1913, œuvre de Mme Loizelier, femme d'un inspecteur de l'enseignement primaire en Lozère qui en fit don, en 1841, à la Société d'agriculture, dont on ne sait trop ce qu’il est devenu.
▪ Vitraux de la cathédrale de Mende
Le pape Urbain V est associé à la Vierge Marie et à saint Privat qui ont donné leurs noms à cette très belle cathédrale.
Dans la chapelle absidiale du collatéral nord, dite de N.-D. de Mende ou de la Vierge noire : le vitrail représente Urbain V, avec tiare et chape rouge, à genoux devant la Vierge Marie qui tient dans ses bras l'Enfant Jésus lui offrant la cathédrale de Mende (cathédrale en réduction). À proximité, dans la pierre, un blason érodé du Souverain pontife.
Dans le transept sud, dans les verrières du second niveau, saint Privat et Urbain V
Ailleurs en France
Cet ailleurs nous incite à une première étape : à Apt, diocèse historique de Provence depuis le IIIe siècle jusqu’au Concordat de 1801 ! Le vitrail qui orne le chœur de la cathédrale Sainte-Anne, a une histoire puisqu’il fut offert par Urbain V lors de sa venue dans la basilique, le 22 octobre 1365, prier sainte Anne et se recueillir sur la tombe de ses oncle et tante Elzéar et Delphine de Sabran ; lui confier également son projet de ramener la papauté à Rome. Il est l’œuvre du maître-verrier Audibert Chacharelli : sainte Anne, la Vierge et Jésus, entourés de saint Elzéar, d'Urbain V et de Raymond Bot, évêque d'Apt, Rostang Bot et sa fille, seigneur du Soignon. Urbain V lève la main pour bénir les membres de sa famille agenouillés à ses pieds.
Précisons que ce vitrail, guère mis en valeur, est en partie occulté dans le chœur de la cathédrale.
Elzéar de Sabran (1285-1323) fut canonisé le 15 avril 1369 à Saint-Pierre de Rome par le Pape Urbain V dont il était le parrain.
C’est l’occasion de rappeler la figure du frère cadet de Guillaume de Grimoard, le cardinal Anglic de Grimoard qui fit élever à Apt dans l’enceinte du couvent des Cordeliers un splendide mausolée pour recevoir la dépouille d’Elzéar de Sabran.
À Faveraye (Maine-et-Loire) dans l'église Saint-Pierre-aux-Liens : une statue. La crosse a été volée, remplacée par un long bâton qu’Urbain V tient dans sa main gauche. Dans sa tenue vestimentaire habituelle, coiffé de la tiare le pape porte son habit monastique « la coule à capuchon des Bénédictins ». On peut s'interroger sur les raisons de la présence de cette statuette du pape gévaudanais conservée dans cette modeste église de Maine-et-Loire. Une explication plausible, un remerciement des moines bénédictins de Saint-Maur qui vivaient et occupaient le prieuré de Faveraye qui se trouvait près du bois de L'Assay.
À Marseille ou Guillaume de Grimoard fut abbé de Saint-Victor pendant quelques mois, après avoir passé une bonne dizaine d’années à l’abbaye Saint-Germain d’Auxerre. Le tableau Urbain V réalisé au début du XXe siècle s'inspire très librement d'une fresque retrouvée à Assise. Il est exposé dans le chœur de l'abbaye.
Montpellier est une ville qui doit tant à Guillaume de Grimoard : pour s'en persuader, il suffit de prendre connaissance de la conférence de Monique Cordoni, texte parue dans Mémoire d'Oc n°220, (janvier 2021). On mentionnera la plaque commémorative aux armes du pape, rappelant le Collège de Mende dit des Douze-Médecins fondé par Urbain V, destiné à accueillir les étudiants gévaudanais particulièrement méritant, (Dans le quartier Saint-Mathieu, rue Germain) et surtout un médaillon placé dans le vestibule d'entrée de l'ancienne faculté de médecine. Il s'agit d'une copie de la tête du gisant conservé au musée Calvet d'Avignon. Et la tête d'Urbain V, dans une chapelle en décrépitude de la cathédrale de Montpellier.
Regrettons qu'une suggestion émise par Théophile Roussel, alors président de la Société d'agriculture, industrie, sciences et arts de la Lozère, n'ait pas été prise en considération. En 1857, le philanthrope lozérien pensait, qu'à l'occasion de la restauration de la cathédrale Saint-Pierre, il serait judicieux d'élever, à Montpellier, un quelconque monument au pape Urbain V. Et il proposait donc, que face à l'entrée principale et devant les deux tours du porche, sur une petite place surélevée, se dresse une statue du Saint-Père gévaudanais, bénissant ce quartier de la ville, comme il le fit en 1367. Mais cette requête ne trouva aucun écho. On lui réserva seulement le nom d'une rue, comme à Marseille d'ailleurs.
Terminons notre randonnée iconographique nationale sur les traces d'Urbain V, dans la ville d'Avignon, siège alors de la papauté.
Commençons par l'œuvre d'un excellent peintre de scènes allégorique et historique du XIXe siècle : Henri Auguste Calixte Serrur (1794-1865), originaire de Lambersart, dans le Nord. Après des études à Lille, il obtient une bourse pour étudier aux Beaux-Arts de Paris. Il sera l'élève de Jean-Baptiste Regnault. Cela explique sans doute qu'il se soit spécialisé dans les scènes historiques, antique ou médiévale. Henri Serrur réalise, en 1839-1840, les portraits des neuf papes d’Avignon (les sept + les 2 considérés comme schismatiques : Clément VII et Benoît XIII). Placés naguère dans La chambre des notaires du Palais des Papes, ils ont été dispersés dans plusieurs musées. Difficile de trouver une quelconque ressemblance avec la réalité puisque on sait que ce fut le même modèle qui posa pour l'artiste. Ce ne sont que des stéréotypes.
Cependant, ces icônes pontificales seront source d’inspirations. En premier lieu un certain Jean Garnier (1817-1897), peintre originaire de Thoissey, dans l'Ain, fixé à Lyon puis à Marseille avant de s'installer définitivement en Avignon à partir de 1854 : son atelier était situé, place Saint-Pierre. Il s'est lancé également dans la photographie.
En 1869-1870, il peint les papes d'Avignon en s'inspirant fortement des tableaux que Serrur, peignit une trentaine d'années auparavant. Le gouvernement de Napoléon III fit cadeau de ces tableaux qui coûtèrent 700 francs et les cadres en bois doré 420, à l'archevêque d'Avignon qui les installa dans le chœur de la cathédrale Notre-Dame des Doms, siège de l'archidiocèse.
Garnier a-t-il peint les neuf papes qui se sont succédé à Avignon ? Aucune preuve. Seule certitude, dans le chœur de Notre-Dame des Doms, les deux antipapes n'ont pas droit de cité. Encadrent donc le pape Urbain les six autres "pontifes avignonnais" : Clément V, (le pape maudit) Jean XXII (Cardinal Duèze – conclave réuni à Lyon – âgé de 72 ans, il règnera pendant 18 ans. Incarné par Henri Virlojeux, dans Les rois maudits), Benoît XII (Palais des Papes), Clément VI (Le Magnifique), son prédécesseur Innocent VI (le Réformateur) et son successeur Grégoire XI (le pape du retour à Rome).
À noter qu'un 8e portrait figure dans le chœur de N-D des Doms, celui du pape Jules II, Julien de la Rovere alors légat du pape (il fut évêque de Mende de 1478 à 1483 sans mettre les pieds dans son diocèse, puis archevêque d'Avignon) à l'origine du petit Palais.
Mais l'histoire ne s'arrête pas en si bon chemin. 130 années plus tard, le département du Vaucluse commande à l’artiste avignonnaise Agnès Saint Gal de Pons une fresque en trompe l’œil dans la rue Dorée. L’œuvre co-réalisée avec Patrick Devauchelle inaugurée en 2000 est saisissante de réalisme car y ont été ajouté comme des fissures de toile ou une décrépitude de l’enduit mural. Mais quid de l’originalité de cette œuvre à vocation touristique ? Les visages des papes sont de simples calques de ceux imaginés par Henri Serrur au XIXe siècle, et repris par Jean Garnier ! En bref, une copie de copie !
Quelles que soient les qualités artistiques que l'on puisse attribuer aux représentations iconographiques données du pape Urbain V par Serrur, Garnier ou Saint-Gal de Pons, il faut constater qu'elles ne reposent sur aucun fondement historique. À nos yeux, elles n'apportent rien ou presque à l'idée que l'on peut se faire du pape gévaudanais.
Il en est différemment du gisant d’albâtre conservé au musée Calvet. Iconographiquement parlant, on surfe là sur le meilleur car il faisait partie d'un cénotaphe, élevé par les bénédictins, peu après le décès du Saint Père. Voici la copie présentée au Palais des Papes :
Un peu d'histoire : une statue funéraire du Pontife, mutilée sans doute sous la Révolution, fut trouvée, en 1836, dans l'église du collège Saint-Martial d'Avignon (lieu-dit aussi Palais de la reine Jeanne).
L'abbé J.-B. Pascal, membre du clergé parisien, chanoine honoraire du diocèse de Mende, souhaitait qu'elle soit transportée à la cathédrale de Mende. Ce vœu ne fut pas exaucé : elle était donnée par la ville d'Avignon à son musée lapidaire, le musée Calvet.
Cette statue, datée des années 1390, est peut-être de Bartolome Cavalier, attaché à la cour pontificale d'Urbain V qui avait sculpté la statue funéraire de son prédécesseur à la tête de la chrétienté : Innocent VI. En effet les yeux du Saint Père sont aux trois quarts fermés : c'est une tradition avignonnaise. Alors qu'en France les yeux des gisants sont ouverts et en Italie les yeux sont fermés.
Le nez du gisant est abîmé, les pieds manquent, mais la figure reste saisissante. Selon Eugène Müntz « l'artiste a voulu présenter un portrait sincère et vivant : yeux largement fendus, bouche grande, menton proéminent, rides sur le front ». Robert Brun quant à lui, ajoute « Statue en marbre transparent, d'une chaude patine dorée. La tête repose sur les coussins, les yeux à demi-fermé. Le cou puissant, le menton volontaire, les rides du front et la patte d'oie accusée des tempes, les plis profonds qui encadrent le nez et la bouche, autant de traits distinctifs qui montrent qu'il s'agit bien d'un portrait ».
Voici pourquoi nous pouvons parler, nous aussi, de portrait, même si celui-ci est un portrait mortuaire.
Ne quittons pas Avignon : rendons-nous à la bibliothèque municipale Ceccano : y est conservé un missel personnel attribué à Urbain V contenant des miniatures et des portraits. La première lettre S du folio 241 est ornée d'un portrait du Souverain Pontife, coiffé de la tiare, visage émacié, au front ridé, bénissant de la main droite, une palme dans la main gauche.
Mais certains spécialistes doutent que ce missel soit réellement celui du Saint-Père gévaudanais et que les portraits qu’il contient soient réellement ceux d’Urbain V.
Autre document remarquable figurant dans le Miscellanea historica représentant Urbain V sur une barque avec ses 2 cardinaux, lors du voyage vers Rome. Il quitte Avignon le 30 avril 1367 pour Rome ville dans laquelle il fera une entrée triomphale le 16 octobre suivant, accompagné par une flotte de 23 galères). Cette scène a été revisitée par le graphiste qui a réalisé en 1999 la couverture de la BD de Jacqueline Bertrand-Gannerie : D'Avignon à Rome.
La flotte avait quitté Marseille le 17 mai 1367. En tête du convoi se trouvait le Grand Maître de l’Hôpital, Raymond Béranger, sur sa célèbre galère noire. Urbain V, en compagnie des cardinaux de Beaufort et de Lajugie, était monté sur une galère vénitienne, envoyée par le doge Marco Cornero. Il était protégé par cinq galères rouges des Chevaliers de Rhodes.
Enfin, à Paris, sur l’un des admirables vitraux de la Sainte Chapelle, figure, paraît-il, une scène aux accents diplomatiques : l’entrevue de Jean le Bon avec Urbain V, en Avignon !
En Italie
Nous voici donc parvenus dans la Ville Éternelle à la recherche des représentations iconographiques du Bienheureux Urbain V. Évidemment, on eût aimé que dans la série des papes située à la hauteur des fenêtres de la chapelle sixtine figure Urbain V. Hélas, cette fresque ne représente que les 28 premiers papes de l'Église morts martyrs.
Il est donc préférable de se rendre à la basilique Saint-Jean de Latran. C’est l’église cathédrale de l’évêque de Rome, le pape. Le Bienheureux Urbain V, y tient une place privilégiée. C’est lui qui l’a fait reconstruire et dans laquelle il a trouvé les chefs de saint Pierre et de saint Paul. Le 3 mars 1368, à l'issue d'une messe solennelle à Saint-Jean de Latran, le pape Urbain V présenta aux fidèles les deux précieux reliquaires. Sur le maître-autel de la cathédrale figurent les armes d’Urbain V.
Maintenant, dirigeons nos pas vers l’église Saint-Paul-Hors-les Murs, l'une des quatre basiliques majeures de Rome (avec Saint-Pierre, Sainte-Marie et Saint-Jean de Latran) : une longue frise de mosaïques, composée de médaillons représentant tous les papes depuis saint Pierre, couronne intérieurement la basilique. Inutile de préciser que la plupart de ces médaillons sont des portraits imaginaires des papes, celui d'Urbain V, le 200e, fait partie de cette catégorie. À noter que celui du pape en exercice, en l’occurrence du pape François, est éclairé. La légende veut qu’une fois tous les médaillons remplis le temps de l’Église prendra fin.
En Italie, plusieurs villes, églises ou monastères sont marquées du sceau du pape Urbain V : à Assise, près de Pérouse, dans la basilique Sainte-Claire, une fresque, sur un plier de la seconde baie de la chapelle Saint-Georges, (à gauche de l'entrée) est attribuée à Pace di Bartolo (XIVe siècle) ; à Casaranello, une fresque de l'église de Santa Maria della Croce, et dans la cathédrale de Cefalu, dans la province de Palerme, en Sicile, décorée de mosaïques byzantines, sur une colonne, à droite de la nef gauche, proche du trône épiscopal, une peinture originale d'Urbain V. Sans doute parce que le Saint Père s'est rendu au monastère bénédictin de Monreale, tout proche. Et encore dans la cathédrale de Bolzano, dans le Haut-Adige, un vestige d'un cycle de la vie d'Urbain V, le représente sur son lit de mort, un notaire à gauche, compilant les bonnes actions du pontife.
C'est à Bologne, à la pinacothèque, que notre attention sera retenue par un tableau, sur bois, à fond d'or, qui reproduit les traits du Pontife, peint de son vivant ou peu de temps après son trépas entre 1370 et 1377. Dû à Simone dei Crocifissi (1330-1399), fils de cordonnier, avec inscription en gothique : Symon fecit, Beatus Uranus Quintus. Il représente le pape en majesté, bénissant de la main droite ; sa tête est coiffée de la tiare à triple couronne. Son visage imberbe, aux traits réguliers. Les mains son gantées, une chape rouge, à bordure et pectoral, le revêt. Il tient dans sa main gauche un diptyque, où se voient les chefs des saints Pierre et Paul. Quatre figures d'anges, disposées sur deux étages, entourent sa tête tiarée.
Terminons notre périple italien, à Monte Cassino, à l'abbaye fondée en 529 par saint Benoît. Un terrible tremblement de terre l'a détruite en 1349. Urbain V fit reconstruire le monastère et prit le titre d’abbé, en 1367, évitant une ruine à court terme.
Dans l’avant-porche du cloître des Bienfaiteurs, 2 statues en marbre sont placées en symétrie : l’une d’elles représente le pape Urbain V.
Pour la petite histoire, notons que le mardi 15 février 1944, le monastère fut détruit au cours des combats acharnés de la 2e Guerre mondiale. Il fut reconstruit entre 1948 et 1956, à l’identique. Quid de la grande fresque du peintre baroque Luca Giordano, qui couvrait la voûte de la nef principale de l'église, fresque signalée en son temps par Théophile Roussel qui aurait vu une belle figure en pied d'Urbain V ?
Bref retour à Bologne pour jeter un coup d'œil sur une carte qui y a été éditée. Elle représente le pape Urbain V recevant Jean V Paléologue. L'Empereur de Constantinople vient demander aux princes d'occident des secours pour lutter contre les Turcs. Le 22 octobre 1369, cérémonie officielle où l'empereur byzantin reconnaît le souverain pontife comme chef incontesté de la catholicité toute entière. Il s'agit d'un moment fort de l'histoire de la chrétienté ; une chrétienté déchirée depuis le schisme de 1054.
Sans oublier un Urbain V assis sur son trône, coiffé de la tiare, la crosse papale en main visible à Loreto, dans la province d'Ancône, dans les Marches, au très célèbre sanctuaire consacré à la Vierge Marie. Urbain V, en effet, aurait fait présent à la communauté d’une icône attribuée à saint Marc, représentant la Vierge Marie.
Ailleurs en Europe
En Suède, la fresque de Johannes Rosenrod (1437) : Sainte Brigitte de Suède et Urbain V dans l’église de Tensta, dans la région du Uppland où Brigitte Birgersdotter (1304-1373) vit le jour.
Urbain V émet, en 1370, le désir de retourner à Avignon pour rétablir la paix entre la France et l'Angleterre. Sainte Brigitte de Suède fit de vains efforts pour le retenir dans la Ville éternelle en l'assurant qu'il mourrait bientôt s'il retournait à Avignon. Malgré ces sombres prédictions, Urbain V partit le 26 août, arriva le 24 septembre. Il mourut le 19 décembre.
En Allemagne la fresque du monastère Altomünster en Bavière : Urbain V et sainte Brigitte et en Tchécoslovaquie la Croix reliquaire conservée dans le fameux trésor de la cathédral Saint-Guy à Prague
▪ en Angleterre.
Le 17 mai 1990, le Centre canadien en Italie, accueillait à Rome le professeur John Osborne pour une conférence intitulée « Peintures murales romaines aujourd'hui disparues représentant le pape Urbain V ».
L'auteur a présenté 3 dessins datant du milieu du XVIIe siècle, réalisés à Rome sur la commande du très grand collectionneur italien Cassiano dal Pozzo (1588-1657), secrétaire du cardinal Francesco Barberini, d'après des œuvres romaines et représentant tous les 3 le pape Urbain V.
Ces dessins, après de nombreuses pérégrinations, sont actuellement conservés dans les collections royales anglaises de Windsor castle : n° 8937, 9201, 9202.
Passons rapidement sur les deux derniers dessins : le pape, coiffé de la tiare à trois couronnes, bénit de la main droite, tenant de la gauche une réduction du diptyque dit de saint Pierre et de saint Paul pour nous attarder sur le premier, le n°8937 : le Saint-Père, trônant, coiffé de la tiare à une seule couronne, bénissant de la main droite et tenant dans la main gauche un modèle réduit du baldaquin de la basilique Saint-Jean de Latran.
Osborne livre des hypothèses relatives à ces 3 œuvres : elles pourraient avoir été peintes sur les parois de Saint-Jean de Latran (disparues lors des grandes réfections du XVIIe siècle) ou peut-être de la basilique de Saint-Jean et Saint-Paul.
Toujours en Angleterre, une miniature rare pleine de symboles, conservée à la British Library. Cette miniature, du deuxième quart du XVe siècle, serait tirée d'un document Vaticinia de summis Pontificibus.
Même si mon objectif est loin d'être exhaustif, je dois vous signaler d'autres représentations iconographiques du bienheureux pape Urbain V bien que certaines n'atteignent nullement des sommets artistiques ou qu'elles soient de simples copies. Nous citerons : la statue que l'on trouve dans l'église Notre-Dame de la Carce, à Marvejols, une icône de Mère Myriam au skite Sainte Foy, en Cévennes, et le tableau de Jean Dupouy, de l'abbaye bénédictine de Notre-Dame de Randol. Sans parler de celles qui illustrent telle ou telle chronique relative aux Pontifes avignonnais qui n'ont absolument aucun lien, ni de près ni de loin, avec la réalité.
Médailles, bulles, orfèvrerie
D'autres indications précieuses nous sont données par différents supports. En premier lieu les monnaies et les médailles.
Gros d’argent ou Florin d'or (de 22 mm) frappé à l'effigie d'Urbain V dans les collections du musée du Gévaudan ; médaille de restitution des papes (bronze de 40 mm) due au Lorrain Ferdinand de Saint-Urbain (1658-1738) qui réalisa ce travail lors d'un séjour à Rome ; médailles modernes frappées par exemple, en 1965, pour célébrer le 1 600e anniversaire de l'abbaye Saint-Victor de Marseille : le moine Jean Cassien, fondateur de l'abbaye phocéenne, et Urbain V, qui en fut le Père abbé, se partagent le revers.
Les camées du trésor de Notre-Dame de Paris : - les 258 premiers, en ivoire, furent sculptés en Italie par les graveurs des ateliers de Torre del Greco : Urbain V, imberbe, tête tournée vers la droite. Cette collection d'une valeur inestimable a survécu, semble-t-il à la tragédie du mois d'avril 2019.
Sans compter les sceaux de cire scellant les bulles papales
En l’année 1364, Urbain V a accordé par un Bref une « indulgence » à ceux qui iraient en pèlerinage dans l’église de Sainte-Catherine d’Alexandrie de Wunsiedel (ville allemande jumelée avec Mende)
Il y a également les objets en matière plus modeste, médaille ancienne en terre cuite ou matrice en plâtre de médaille.
Arrêtons-nous sur les pièces d'orfèvrerie, étudiées par Isabelle Darnas. La plus remarquable, la crosse épiscopale, offerte à Mgr de Cabrières (1830-1921) par le clergé du diocèse de Montpellier, élevé au cardinalat par le pape Pie X en 1911. Ecclésiastique singulier : refus d'assister aux cérémonies du 14 Juillet, célèbre en personne la messe le 21 janvier en souvenir de Louis XVI, ouvre la porte de sa cathédrale aux viticulteurs en grève en 1907 (d'où son nom d'évêque des gueux), annonce son excommunication au préfet de l'Hérault en 1880. Ami de Frédéric Mistral, c’est l'un des principaux acteurs de l'Union sacrée durant la Grande Guerre.
Cette crosse, en argent repoussé et ciselé, avec inclusion d'émail, réalisée par l'orfèvre lyonnais Armand Caillat, lui fut offerte en 1890. On remarquera le crosson décoré d'une sculpture en ronde-bosse représentant l'évêque agenouillé offrant son église à la patronne de la ville, Notre-Dame des Tables. Et surtout le nœud de la crosse aux quatre médaillons lobés avec les portraits des papes Nicolas IV (créateur de l'université de Montpellier en 1289), Martin V (qui ramena définitivement la papauté à Rome en 1420), Léon XIII (pape en exercice depuis 1870) et Urbain V.
Un mot touchant les émissions philatéliques : La Poste ne s'est guère montrée généreuse à l'encontre des papes d'origines françaises, seul Gerbert d'Aurillac, Sylvestre II, le pape de l'an mil, a eu droit à quelques égards, en 1964. Mais, pas de traces des papes d'Avignon. Seuls deux timbres évoquent le Palais des Papes : le premier édité en 1938 (0,30 F + 0,10 F de surtaxe), le second, quelque 70 ans plus tard, proposant une vue panoramique du site architectural.
Cette lacune nous donne l’occasion de souligner l'initiative de notre Association qui propose à ses adhérents une vignette philatélique à l'effigie du bienheureux Urbain V s'inspirant d'une huile sur bois de la fin du XIVe siècle.
Il arrive souvent que la présence d'Urbain V dans telle église ou sur tel monument se manifeste non par une représentation iconographique, mais par les armes familiales, peintes sur un mur, gravées dans la pierre comme à Saint-Flour du Pompidou, figurant sur un vitrail ou ailleurs. Elle n'est pas à négliger, loin s'en faut. Bernard Velay, distingué héraldiste, les a interprétées.
L'exemple le plus insolite se trouve à Bédouès, sur la pointe du clocher de Saint-Saturnin : le blason des Grimoard flotte dans les airs et semble se détacher dans le ciel ; mais également, clef de voûte comme à Quezac,
Les armes sur le linteau extérieur de la collégiale de Bédouès, armes érodées sur le linteau du portail de l'église Saint-Nicolas au Monastier en bordure de l’artère qui traverse le village comme sur la façade de la mairie, deux sculptures dues à Didier Servant ; sur les vitraux de nombreuses églises de Lozère et d'ailleurs, avec un bel exemple dans l'église d'Ispagnac etc.
L'université Jagelonne de Cracovie, en Pologne, fut fondée, en 1364, par le pape Urbain V. Cela explique le pourquoi du blason « de gueules au chef émanché de quatre pièces d'or », les armes de Guillaume de Grimoard, sur la façade de cette université réputée.
Témoignages disparus
Ils sont à coup sûr très nombreux. Contentons-nous de citer les témoignages du pape Benoît XIV (1740-1758) : il signale 3 images d'Urbain V au milieu du XVIIIe siècle, à Rome : à Saint-François a Ripa, à l'église de Saint-Chrysogone, la troisième à Saint-Sauveur-de-Curie où il était représenté tenant devant sa poitrine l'image de la tête des saints Pierre et Paul.
▪ À Nimfa, près de Cori, province de Velletri, existait une fresque de la fin du XIVe siècle dans l'abside d'une église en ruines.
Cette représentation du pape Urbain V on la retrouvait également dans l'église Saint-Jean de Florence et à la fin du XVIIe siècle à Sainte-Marie des Anges della Pieve.
Le Tombeau d'Urbain V à Saint-Victor commandé au maître tailleur de pierre Jean Joglari : 7 m de haut, 3,75 de large où était sculpté le gisant. Le tout placé dans le chœur, à gauche. Aujourd'hui disparu.
NB- gisant, placé en 1980, moulage d'après la tête conservée au musée Calvet, trouvée en 1836, de celui qui se trouvait sur le cénotaphe d'Urbain V dans l'ancienne église du collège Saint-Martial, à Avignon,
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Je terminerai mon exposé en m'autorisant un clin d'œil au siècle qui est le nôtre, un siècle où la publicité est reine.
Dans la boutique du Palais des Papes, à Avignon, une infusion Tisane du pape Urbain V y est commercialisée. Mieux ou pire, durant l'été 2019, sur certains panneaux Decaux de la capitale, on découvrait une affiche assurant la promotion de vins labellisés Châteauneuf du pape : Cuvées Benoît XII (Côte du Rhône), Clément V (Languedoc) et Urbain V ! Avec un retour salutaire à l’histoire : un saint-pourçain, cuvée Urbain V, rappel plus ou moins discret des commandes passées au XIVe siècle par la papauté d’Avignon auprès des vignerons de Saint-Pourçain !
Mais, revenons à des choses plus sérieuses même si j'ai choisi de conclure sur une savoureuse anecdote. Elle concerne une église de quartier à La Garenne-Colombes dans les Hauts-de-Seine. En 1875, fut élevée une chapelle sur un terrain offert par les héritiers d'un banquier franco-suisse, Pierre-Urbain Sartoris (1767-1833). Et on décida, pour rendre hommage aux donateurs de la baptiser « Église Saint-Urbain ».
Dans les premières années du XXIe siècle un maître verrier Normand, Serge Nouailhat, fut sollicité pour réaliser 2 vitraux dans cette église Saint-Urbain. Tout naturellement l'artiste pense s'inspirer d'Urbain V, figure incontestée de la papauté d'Avignon. Mais lui vient à l'esprit qu'un autre pape, Urbain Ier († en 230) fut jadis canonisé comme je vous l'ai précisé au début de mon intervention. Alors l'artiste décida de consacrer un vitrail à chacun des deux Saints Pères, peut-être pour ne pas faire de jaloux ! Tout en oubliant un certain Eudes de Châtillon, Urbain II, qui prêcha la Première croisade, lui aussi béatifié.
Le vitrail dédié au bienheureux Urbain V s'inspire de l'iconographie traditionnelle et l'interprète : Urbain V tient dans ses mains le reliquaire où sont déposés les chefs de saint Pierre et de saint Paul. Mais Serge Nouailhat le traite dans un style particulier que la technique choisie lui impose.
Cependant, l'abbé Dedieu a souhaité aller au-delà : au cours du mois de décembre 2020 furent posé cinq vitraux dus une nouvelle fois à Serge Nouailhat, qui soulignaient les axes essentiels de la vie chrétienne de saint Urbain et du bienheureux pape Urbain V : l'adoration, la formation, la fraternité, le service, l'évangélisation.
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C'est donc sur une image contemporaine que prend fin ce voyage à travers siècles à la quête des représentations iconographiques d'Urbain V, depuis la première représentation connue, à la fin du XIVe, jusqu'aux plus récentes, de la deuxième décennie du XXIe. Libre à chacun de penser que les effigies de ce Souverain Pontife sont des portraits fidèles ou, dans l'immense majorité des cas, de simples portraits supposés. Quoi qu'il en soit, ils nous confortent, dans notre certitude de l'universalité et du rayonnement du bienheureux pape Urbain V, que le chroniqueur médiéval Froissart jugeait « saint homme et de belle vie », un "humaniste" toujours d'actualité dans l'Église d'aujourd'hui.
En gardant surtout à l'esprit l'adresse du grand poète toscan, Pétrarque, un contemporain de Guillaume de Grimoard : « O grand homme, sans pareil dans notre temps et dont les pareils en tout temps sont trop rares. »
Les Sources
- Écrites
Les Papes, vingt siècles d’histoire – Librairie vaticane – 2002.
Paul AMARGIER : Urbain V Un homme une vie – 1987.
Marius BALMELLE : Iconographie du pape Urbain V – Bulletin de la Société des lettres, sciences et arts de la Lozère. 1964.
Marius BALMELLE : Bulletin de la Société nationale des antiquaires de France Iconographie du pape Urbain V -1965. P. 85-86.
Catherine BERTRAND-GANNERIE : D'Avignon à Rome -Téqui. 1999.
Jean-Marc CHEVALIER : 101 TRESORS dans le désordre Au cœur des collections du musée- SLSAL -2021.
Yves CHIRON : Urbain V le bienheureux Via Romana 2010.
Collectif : Programme du festival de Mende 1981 Urbain V - 1981.
Monique CORDONI : Urbain V, le Pape de Montpellier - Mémoire d'Oc n°220, (janvier 2021).
Isabelle DARNAS, Laurent HUGUES : Urbain V, grand homme et figure de sainteté - 2010- DRAC.
Adrien DONNADIEU : Le prieuré Saint-Sauveur de Chirac - Revue du Gévaudan, Causses & Cévennes (n°43- 1e semestre 2017).
John OSBORNE : Peintures murales romaines aujourd’hui disparues représentant le Pape Urbain V. Conférence donnée à Rome le 17 mai 1990.
Maurice PROU : Étude sur les relations politiques du pape Urbain V avec les rois de France Jean II et Charles V 1362-1370- Collection Littératures 2017.
Françoise de RAMEL : Les vallées des papes d’Avignon - 1954
Jean-Baptiste RIETSTAP : Armorial général T. 1 – G.B. Van Goor - 1861
Antoine de ROSNY : Urbain V – un pape du Gévaudan 1310-1370 - Conseil général de la Lozère. 2005.
Anne Trémolet de Villers : La place Urbain V en péril - APPEL.
Topoguides Le Chemin Urbain V GR 670 FFRP - 2015.
- Muséologiques
Le bienheureux pape Urbain V, bienfaiteur du Gévaudan exposition créée en 1981 par Anne Trémolet de Villers pour le 1er Festival de Mende et du Gévaudan.
GÉVAUDAN-LOZÈRE Terre de vocations médicales d’exception exposition créée en 2019, à l’occasion du deux-centième anniversaire de la Société des lettres, sciences et arts de la Lozère.
- Numériques
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